« L'intelligence du cheval, lectures et expériences. »



 
A tous mes lecteurs, lectrices assidu(e)s, veuillez me pardonner ce silence prolongé. L'hiver 2014 fut dur, froid et enneigé, interminable. Les soins quotidiens ("trains") ainsi que l'entraînement des chevaux 4 jours par semaine m'ont occupé pas mal. De plus, j'ai pris sous mon aile une jeune fille de 18 ans, Erica, passionnée de chevaux, comme stagiaire. Nous avons dressé, pour la trail, 5 poulains QH et Paint de 3 et 4 ans et parfait l'entraînement de 21 autres chevaux adultes. Bref, nous n'avons pas chômé et l'hiver rigoureux 2014 n'a jamais eu le dessus sur nous !!!
Puis les travaux printaniers (fumier, clôtures) et estivaux (foins) ainsi qu'une semaine de rêve au Calgary Stampede, Alberta ont contribué à retarder la livraison de cette chronique.
 
1. Introduction.
 
J'avais l'idée, depuis un bon bout de temps, de mettre sur papier mes interrogations et réflexions sur l'intelligence du cheval. Le cheval est-il plus ou moins intelligent que le chien ? De quel type d'intelligence peut-on parler ? Le langage des chevaux, leur comportement et la hiérarchie en troupeau, les tours de chevaux savants, Cavalia, etc.
 
2. Une grande mémoire.
 
Le cheval jouit d'une très bonne mémoire. Il reconnaîtra, par exemple, son cavalier-compagnon même après plusieurs années de séparation surtout par le timbre de voix, l'approche et la gestuelle. De même pour un compagnon de pâture ou d'écurie. L'été dernier, j'ai acheté un gelding QH palomino qui vivait avec une jument QH noire depuis 7 ans. Deux mois plus tard, j'ai amené la jument au ranch. Lorsqu'elle a henni dans la remorque fermée, le gelding l'a aussitôt reconnue et ils se sont mis à se répondre, impatients de se retrouver. D'autre part, mon expérience me permet d'affirmer qu'un cheval dressé n'oublie jamais ce qu'il a appris. Peut-être sera t-il quelque peu rouillé au début, mais il retrouvera vite ses repères. Un peu comme le chien, le cheval sait et reconnaît son nom. Aussi est-il important, lors de l'achat d'un cheval de demander son nom au propriétaire.



Voici le gelding palomino en question.

3.le sens de l'orientation.
 
Comme plusieurs autres animaux, le cheval possède un sens de l'orientation phénoménal. On ne compte plus les histoires de cavaliers égarés qui se sont abandonnés à leur monture pour rentrer à bon port. Vous n'avez qu'à tenter l'expérience avec votre cheval. Empruntez un sentier une fois et le cheval l'aura en mémoire. Certains chevaux plus dominants, par exemple, s'obstineront à suivre un chemin si vous voulez vous en écarter. On a aussi rapporté le cas de ce cheval qui avait parcouru 250 km d'une traite pour retourner à son écurie alors qu'il avait effectué le trajet en train !!!

4. La fidélité.
 
Le sens de la fidélité se bâtira auprès de l'homme vivant et travaillant chaque jour à ses côtés : cheval de trait, de compétition quelle que soit la discipline (cutting, reining, roping, plaisance, polo, saut, etc.) Le père de l'osthéopathie équine, le Français Dominique Giniaux, rapporte cette anecdote. Une femme traversait le désert de Gobi lorsque, après plusieurs jours en selle sous un soleil implacable, elle tomba inanimée à ses sabots. Lorsqu'elle sortit enfin de sa torpeur, elle ne savait pas combien de temps elle était restée inconsciente. Mais 24 heures au moins s'étaient écoulées. Elle le comprit grâce aux empreintes de sabots faisant cercle autour de son corps. Les traces de sabots montraient que le cheval avait bougé à la mesure de la course du soleil, s'interposant entre lui et sa cavalière. Le cheval avait protégé la femme du soleil par son ombre veillant ainsi à ce que le feu brûlant de l'astre n'atteignit pas sa cavalière inconsciente. Pensait-il que d'elle dépendait sa survie ? Difficile de l'affirmer, mais il reste que ce cheval a sauvé sa cavalière d'une mort certaine.
Par ailleurs, vous êtes sûrement, un jour, pour une raison ou une autre, tombé de cheval. Et, surprise, votre monture a stoppé net. Pourquoi ? Probablement parce que vous et votre cheval formez un tandem et que ce dernier en est conscient.



Montana Kid, un cheval alerte.

 
5. La faculté de ressentir les émotions.
 
Les chevaux possèdent cette faculté de nous lire. Ils perçoivent nos peurs, nos douceurs, nos tristesses, nos feelings, nos états d'âme. Au dressage par exemple, ne montez pas en selle si vous avez peur et que vous êtes hypernerveux. Un peu comme le chien, le cheval demeure un merveilleux confident pour les personnes souffrant de dépression, de solitude, de manque de confiance ou encore atteintes d'un handicap physique ou mental. Dans un numéro de la revue America's Horse, on cite le cas d'une dame qui s'est remise d'une forme maligne de cancer en adoptant un programme de remise en forme par l'équitation. Dans un autre numéro de la même revue, un homme  paraplégique  explique comment l'équithérapie avec son fidèle compagnon l'aide à garder le moral.



Holly Quincy Cash, une jeune pouliche très éveillée.

 
6. La notion de jeu.
 
Jouer avec son cheval ou lui permettre de jouer en sa compagnie n'est pas une perte de temps. Le jeu développe son intelligence, sa capacité d'adaptation et son adresse. De plus, il accroît la complicité entre le cavalier et sa monture. C'est aussi un moyen efficace pour lutter contre le stress et maintenir le moral. Par exemple, laissez-le s'ébattre en ring et dépenser son trop-plein d'énergie. Vous observerez sa nature curieuse : il inspectera les lieux, s'arrêtant ici et là, flairant le sol, vérifiant les sorties (fenêtres et portes). Puis, il s'approchera lentement de vous et, à ce moment, vous pourrez commencer le travail.
Le cheval comprend son métier et se perfectionne, aidé en cela par l'habitude. On a observé que lorsque leur métier est ludique, cutting et reining par exemple, ils paraissent plus intelligents.



 Championnat national de cutting au Calgary Stampede, Alberta.
 On a observé que lorsque leur métier est ludique, les chevaux paraissent plus intelligents.

 
7. Les différents sens.
 
a) le toucher.
Chez l'humain, le toucher se rapporte surtout aux doigts et aux mains. Chez le cheval, il concerne toute la surface du corps. Le cheval préférera une séance de pansage à quelques caresses d'encouragement (les vibrisses, poils ornant le bout du nez, correspondent aux mains). Leur grande sensibilité des pieds  permet d'adapter son équilibre, le déplacement de ses membres et son allure en fonction des informations reçues grâce à la chair située sous la sole et la fourchette, très riche en vaisseaux sanguins et en terminaisons nerveuses.
 
b) l'odorat.
Moins développé que celui du chien, l'odorat du cheval est bien plus fin que le nôtre. Par exemple, un étalon flaire une jument en chaleurs à une distance de 800 mètres. Ils détectent aussi les points d'eau même les plus éloignés. Il reconnaîtra à coup sûr l'odeur de son cavalier. Attention, cependant, à l'alcool, aux parfums qui viennent mélanger les choses.
 
c) la vue.
La mobilité des yeux du cheval lui permet de balayer un champ de vision latéral de plus de 180 degrés. Il a également une vision binoculaire (des 2 yeux) à 2 mètres devant lui. Toutefois, l'implantation latérale des yeux du cheval présente un inconvénient : son champ de vision frontale comporte un angle mort dont il faut tenir compte.
 
d) l'ouie.
L'oreille du cheval permet d'entendre, dans les aigus et les graves, des sons qui nous restent inaccessibles. L'oreille humaine perçoit l
es sons dont la fréquence se situe entre 16 Hz et 20,000 Hz. Le cheval, entre 6 Hz et 33,500 Hz. Comme le chien, il perçoit les ultrasons qui nous échappent complètement. Pour éviter certains désagréments en randonnée avec un cheval nerveux, vous pouvez fredonner en sifflant ce qui le détendra et masquera les bruits environnants qui pourraient déranger votre monture. L'utilisation de la  radio dans une écurie créera une certaine ambiance et contribuera à calmer votre cheval.


Ce gelding Paint tobiano inspecte avec soin son nouvel environnement.


8. Conclusion.
 
Maurice Hontang, dans sa "Psychologie du cheval", exprime on ne peut mieux les limites de l'intelligence du cheval.
"Le cheval est doué sans doute d'une forme d'intelligence se rapprochant à des degrés différents, de celle de l'homme. Toutefois, la faculté de raisonnement est d'ordinaire très limitée. De plus, il arrive rapidement au degré maximum d'intelligence qu'une éducation adéquate permet de développer chez lui. Ce stade atteint, il lui est bien plus difficile de progresser par un appel à un raisonnement, même simplifié."


Pour ma part, j'ajouterai qu'on voit souvent certains chevaux "brillants" capables d'ouvrir leur porte de box ainsi que celles de leurs compagnons d'écurie. Rarement, toutefois, ils penseront à les refermer ! De même, d'autres parviendront à ouvrir un robinet pour s'abreuver et, une fois désaltérés, laisseront couler l'eau.. Et alors !!!
 
N'hésitez pas à me faire part de vos questions, commentaires ou suggestions de chroniques à ranchdesnoyers@hotmail.com.


 
Prochaine chronique : le Calgary Stampede, Alberta.